Le « Diamonds And Pearls Super Deluxe » contient l’album « Diamonds And Pearls » en version remasterisée et de nombreux enregistrements conservés dans le coffre de Prince à Paisley Park. La conception de cet album est retracée à travers onze chansons incluses dans ce coffret. Pour enregistrer les nombreux titres qui ont été considérés à un moment ou un autre pour l’album « Diamonds And Pearls », Prince n’était pas seul et pouvait compter sur ses nouvelles recrues qui l’ont accompagné sur le Nude Tour. Cet article est consacré à la construction de ce disque et à la formation du groupe « The New Power Generation ».

Funkiest band in show business

Après le Lovesexy Tour, Miko Weaver, Levi Seacer et Matt Fink sont toujours là, mais Prince « laisse partir » Sheila E.. Souhaitant se consacrer à sa carrière solo et voler à nouveau de ses propres ailes, elle laisse son tabouret et la batterie à un petit jeune de 18 ans nommé Michael Bland, rebaptisé comme le veut la tradition pour les batteurs princiers, Michael B. Ce dernier est un Minnéapolitain pur jus qui officie dans plusieurs groupes locaux dont, de temps en temps, le Doctor Mambo’s Combo. Prince se rend souvent au Bunkers Music Bar & Grill, ce bar de Minneapolis pour voir jouer ce Combo mené par Margaret Cox, ancienne chanteuse de Tamara & The Seen, groupe produit par Jesse Johnson. A la fin d’un de ces shows, Prince va à la rencontre de Margaret pour s’enquérir de ses nouvelles, et savoir si son contrat avec Jesse court toujours. Il a en tête d’enregistrer un album avec elle. Il en profite également pour la féliciter pour sa performance de cette soirée mais Cox l’interrompt en lui disant « le batteur de ce soir, n’est pas notre batteur habituel. Tu devrais revenir la semaine prochaine, il sera là, c’est un petit jeune qui s’appelle Michael Bland, tu vas l’adorer ». Prince revient et est suffisamment impressionné et séduit pour l’embaucher sur le champ. C’est ainsi que Michael B. se retrouve dans le clip de « Partyman » tourné au mois d’août 89 puis au Saturday Night Live en septembre pour accompagner Prince sur « Electric Chair ».

Boni Boyer, claviériste sur le « Sign O The Times Tour » et le « Lovesexy Tour » quitte définitivement le clan Princier. N’ayant pas sa langue dans sa poche et ne se laissant pas faire lorsque Prince lui parlait mal, Prince décide de se priver de ses talents. Sa place est laissée vacante pour le clip de « Partyman ». Elle est prise le temps d’une performance au Saturday Night Live par Patrice Rushen. Boni Boyer est alors remplacée par Rosie Gaines, dont le parcours sera détaillé dans le chapitre qui lui sera consacré dans cette série d’articles. Autre départ, et non des moindres : Eric Leeds et Atlanta Bliss, qui resteront néanmoins dans le périmètre de Prince puisque Leeds démarre sa carrière solo sur Paisley Park Records et continue de participer, avec ou sans Atlanta, à des sessions d’enregistrements avec Prince. Ils ne seront pas remplacés pour le Nude Tour, Candy Dulfer ayant décliné ce poste après avoir participé au clip de « Partyman » et à la performance au Saturday Night Live.

Dernier départ définitif après le « Lovesexy Tour » : Cat. Pendant cette tournée, un album orienté rap était envisagé et quelques chansons ont été enregistrées à Paisley Park. Début 1989, Cat estime qu’elle devrait travailler un peu plus avec le producteur anglais Tim Simenon et signe un contrat avec le label Red Dot Records nouvellement créé par Steve Fargnoli, qui venait tout juste d’être viré de son poste de manager par Prince. Cette signature l’éloigne de facto du kid de Minneapolis.

Game Boyz

Pour les besoins de son futur film, Prince recrute des danseurs qu’il avait déjà repérés en 1983 : Tony Mosley, Damon Dickson et Kirk Johnson, un trio de Minneapolis qui se produit sous le nom de TDK. Ils ont attiré l’attention de Prince lorsqu’il les a vus danser au First Avenue et ont donc été invités à participer au film « Purple Rain » dont le tournage allait débuter. Bien qu’ils aient préparé plusieurs chorégraphies à partir des chansons du film (ils avaient eu une cassette en amont pour s’entrainer), leurs silhouettes ne seront visibles que sur le balcon du club pendant « Jungle Love » (les trois policiers qui dansent). Tony Mosley, lui, aura droit à un gros plan en tant que figurant pendant « Sex Shooter ».

Prince les invite ensuite pour qu’ils performent lors de la première du film « Purple Rain » à Hollywood, mais les choses iront crescendo pour le trio qu’on surnomme alors les « Purple Rain Dancers ». En 1987 et 1988, ils participent aux clips de Madhouse « 10 » et « 13 », puis au clip de « Glam Slam ». Fin 1989, ils sont rappelés pour faire partie du film « Graffiti Bridge » dans lequel ils tiendront des rôles de danseurs derrière Prince, sont rebaptisés « Game Boyz » (comme la console de jeu qui venait de sortir) et feront naturellement partie de la tournée « Nude » qui a démarré quelques mois après la fin du tournage.

A l’occasion d’un soundcheck, Tony s’amuse à rapper « The Humpty Dance » de Digital Underground. Prince, surpris de voir que son danseur pouvait rapper, lui demande d’interpréter ce titre pendant le concert et de commencer à écrire des textes qu’il pourrait insérer à certains moments. C’est ainsi que « The Flow » nait pendant un soundcheck et fera partie intégrante de « The Future » sur scène. La place laissée à Tony M. et Rosie Gaines sur le Nude Tour est à l’image de celle qu’ils auront sur le prochain album : prépondérante. Mais si l’arrivée de Rosie est appréciée, l’orientation rap prise par Prince avec Tony M. fera débat parmi les fans.

Bien qu’annulé à la dernière minute en 1987, le « Black Album » s’est quand même frayé son chemin vers les oreilles des fans et des journalistes de la presse musicale. Sur la chanson « Dead On It », Prince livre sa position sur ce genre musical en sous-entendant que les rappeurs sont sourds et qu’ils ne savent pas chanter. Un jeu de mots sur « the only good rapper is one that’s dead…on it » laisse quand même place à l’ambiguïté, cette phrase pouvant être comprise comme « Un bon rappeur est un rappeur mort » et « un bon rappeur est celui qui est à fond dedans ». Toutefois, dans ses discussions avec ses ingénieurs et son entourage, Prince faisait clairement comprendre qu’il ne comprenait pas le rap et qu’il était froissé d’être déclassé dans les charts par cette génération d’artistes qui, selon lui, ne font « que » parler au micro sur de la musique piquée à d’autres alors qu’il a passé des années à apprendre à jouer des instruments, chanter correctement et composer des chansons originales. Bien que des éléments rap aient été présents dans sa musique ici ou là (de « Holly Rock » pour Sheila E. au rap d’ « Alphabet Street »), ce ne serait qu’après avoir écouté « Fight The Power » de Public Enemy, qui a été un des hymnes de l’été 1989, que Prince a revu sa position. Interrogé sur ce revirement par Sky Magazine en 1991, Prince répondra « On a tous le droit de changer d’avis ».

Sessions à Londres et Tokyo

Le Nude Tour a été marqué par ses étapes londoniennes. Prince était quasiment en résidence à la Wembley Arena, en établissant au passage un record pour un artiste sur une année en y donnant 16 concerts entre juin et juillet. Début juillet, il enregistre :

  • « Schoolyard »,
  • « Daddy Pop », 
  • « Walk, Don’t Walk » aux studios Olympics de Londres (pour ce qui allait devenir « Diamonds And Pearls »), en plus de « My Tender Heart », « Pain », « In The Name Of Love », une reprise de « Turn Your Lights Down Low » de Bob Marley & The Wailers et « Streetwalker » aux studios Metropolis (pour les besoins de « Concrete Jungle », l’album de Rosie Gaines ).

Schoolyard (7’10) – inédit

  • 2 juillet 1990 – Londres, Olympic Studios
  • 25 novembre 1990 – Paisley Park (mix)

« Schoolyard » était incluse sur les versions initiales de ce qui allait devenir l’album « Diamonds And Pearls ». Selon Michael B., Prince a retiré cette chanson parce qu’il pensait que c’était un titre d’album à lui-tout seul et qu’elle a été supplantée par « Diamonds And Pearls ». Enregistrée à Londres pendant le Nude Tour, « Schoolyard » est une chanson autobiographique dans laquelle Prince raconte un épisode de sa vie de lycéen lorsqu’il était amoureux d’une certaine Cari, une fille plus jeune que lui qu’il voulait épouser. Il avait 16 ans, elle en avait 14.

Dans son autobiographie inachevée, The Beautiful Ones, Prince parle de Cari en ces termes :

« Pendant ces années d’apprentissage au cours desquelles notre groupe s’est rodé et a commencé à nous rapporter de l’argent grâce aux concerts qu’on nous proposait, une jeune femme a exercé sur nous une influence plus importante que les autres et nous a laissé une impression durable. Elle se prénommait Cari. C’est Tyka, ma sœur, dont j’avais été séparé, qui me l’a présentée. Cari a été ma première véritable petite amie. C’était une vraie fille du ghetto qui cumulait à elle seule toutes les caractéristiques contre lesquelles mon père m’avait mis en garde : le corps de Cari était un appel au crime et ses courbes naturelles s’avéraient particulièrement redoutables le week-end. Cari avait coutume d’arborer des hauts de survêtement, des minijupes ridiculement courtes avec des collants assortis. Dans (le film) Wattstax, il y a une scène au cours de laquelle une jolie fille black vêtue d’un haut de survêtement danse sur de la musique funk. Rien, ni avant ni depuis, ne m’a semblé plus glacial que cette fille se livrant à ce numéro particulier. Cari fut la première fille à soumettre un garçon de sa communauté à ce qui ressemblait à de la convoitise animale. Quand la pensée rationnelle se trouve dépassée par la puissance de l’attirance physique. Cette sensation pourrait s’exprimer à travers des mots dont personne ne soupçonne même l’existence. Cette sensation risquerait de nous inciter à associer entre eux des mots qui ne vont pas ensemble, mais s’accordent tellement bien à l’oreille qu’on ne se contente pas de les lire, mais qu’on en vient à sentir leur odeur. Il n’y a que lorsqu’un écrivain a vécu une expérience par lui-même qu’il est vraiment en mesure de la faire partager aux autres. C’est ce qui arrive quand deux amoureux se regardent dans les yeux sans prononcer un mot, dès lors tout fossé disparaît entre eux et ils ne deviennent qu’un. Mais un quoi ? »

Ce sont les dernières lignes écrites par Prince dans son autobiographie inachevée.

Dans « Schoolyard », Prince raconte la fois où ils ont fait l’amour après que Cari ait fumé un joint avec « Squibcakes » des Tower Of Power en musique de fond (samplée sur « Release It »). Comme souvent dans les chansons de Prince, certaines parties des paroles font références à des événements réels, d’autres sont inventés ou mélangés avec d’autres histoires.

« Schoolyard » fait partie de ces inédits qui circulent depuis 3 décennies sur des bootlegs et est appréciée par les fans. Récemment, de courts extraits d’une version différente avec les cuivres d’Eric Leeds (ajoutés plus tard dans l’année) ont fait surface. La version proposée sur le Super Deluxe est bien la version complète/finale de ce morceau avec les cuivres et qui était jusqu’alors hors de notre portée.

Daddy Pop (12″ Version) (6’07) – version inédite

  • 2 juillet 1990 – Londres, Olympic Studios (première session)
  • 18 septembre 1990 – Paisley Park (enregistrements complémentaires dont le rap de Tony M.)
  • Mi-janvier 1991 – Paisley Park (remixes / mix de version longue)

« Daddy Pop » fait partie de ces chansons sur lesquelles Prince fait un usage intensif des samples en recyclant la rythmique de « Rock Steady » d’Aretha Franklin et des dialogues du film « On The Way Up ». Une première ébauche du titre a été enregistrée aux studios Olympic de Londres, en même temps que « Schoolyard » et « Walk, Don’t Walk ». Elisa Fiorillo sera invitée à poser sa voix sur ce titre pendant cette étape londonienne. De retour aux Etats-Unis, le rap de Tony M. est ajouté mi-septembre à Paisley Park, pendant la même session d’enregistrements que la prise studio de « The Flow ».

Plusieurs versions « Daddy Pop » circulent sur des bootlegs depuis les années 90 (avec une prise de voix, des paroles différentes et sans les voix de Tony M. et Elisa Fiorillo), mais la version de ce coffret était jusque-là inconnue. Il s’agit d’un des remixes créés par Keith « KC » Cohen, ingénieur que Prince sollicitera fréquemment durant les années 1990-1992. On ne sait pas trop pourquoi Prince a demandé des remixes pour cette chanson aussi tôt dans l’année (plus de 9 mois avant la sortie de l’album). Bizarrement, le rap de Tony M. n’a pas été retenu par Keith Cohen pour cette version titrée « 12’’ » et donc potentiellement destinée à un maxi-single.

Toutes ces versions alternatives de « Daddy Pop » contiennent des éléments vocaux et sonores qui seront réutilisés pour la première version studio de « The Flow », dont la phrase « Ain’t no stoppin’ now » chantée par Rosie (la première performance live de « The Flow » a été donnée lors du concert donné le 5 août 1990 à Heerenveen aux Pays-Bas). Si « Daddy Pop » sera intégrée sur le projet d’album dès les premières configurations de fin novembre 1990, « The Flow » ne figurera que sur la configuration orientée rap de décembre 1990 (en morceau final après « Something Funky (This House Comes) » et « Call The Law ») de « Diamonds And Pearls ». Le titre sera finalement écarté de cet album-ci puis retravaillé en profondeur. Lors du « Diamonds And Pearls Tour », « The Flow » a été interprétée par Tony M. et Rosie (qui avait un couplet entier) et réarrangée avec une énorme partie de cuivres (par les NPG Hornz). Quelques mois plus tard, à la sortie de l’album « Symbol », on découvrira une nouvelle version sans Rosie Gaines et son fameux chant sur le refrain (« rock 2 the F.L.O.W. »), mais avec Prince sur le premier couplet, Tony sur le second (probablement une de ses meilleures performances studio), et surtout cette nouvelle section de cuivres qui donne une tonalité totalement différente à ce titre.

Les sessions se poursuivront au Japon avec

  • « Willing And Able »,
  • « Strollin’ »,
  • « Money Don’t Matter 2 Night »,
  • « Horny Pony »,
  • « Something Funky (This House Comes) »,
  • « 5 Women »,
  • « Darkside » et
  • « Lauriann ».

Entre les concerts et ces sessions studio, Prince trouve le temps de monter le film « Graffiti Bridge ». A vouloir être sur tous ces fronts en même temps, on se doute que tout ne pouvait pas être réussi….

De retour aux Etats-Unis, Prince continue d’enregistrer, et empile suffisamment de morceaux pour réaliser une première configuration fin novembre 1990 de son futur album, alors appelé « Diamonds & Pearlz ».

Il continuera de travailler sur ce projet, en révisant des titres, en ajoutant des nouveaux et en retirant d’autres. La présence d’un nouveau groupe versatile et disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, et les producteurs-maison de Paisley Park lui permettent de donner forme à toutes ses idées et envies. Les travaux sur « Concrete Jungle » se sont poursuivis, mais pas comme l’aurait souhaité Rosie Gaines puisque d’autres projets viendront le percuter, le vider de sa substance et le retarder, pour finalement aboutir à son annulation en 1994. Parmi les sujets qui ont occupé Prince entre fin 1990 et début 1994, on peut citer les albums de Martika (« Martika’s Kitchen »), Mavis Staples (« The Voice »), Ingrid Chavez, Robin Power et surtout celui de Carmen Electra, le Diamonds And Pearls Tour, l’album Symbol et toutes ses déclinaisons visuelles, les tournées Act I & II, « Goldnigga » pour les NPG, le changement de nom, le conflit avec la Warner. Ces mois ont été riches également en rebondissements et en moments clés dans la vie et la carrière de Prince, avec le départ de membres historiques de son groupe de scène (Dr Fink et Miko), la formation d’un tout nouveau groupe recentré sur Minneapolis, la rencontre avec Mayté…

Insatiable (Early Mix – Full Version) (8’01) – version inédite

  • 8 octobre 1990 – Los Angeles, Larrabee Sound Studios

Avec « Thunder », « Insatiable » est la seule chanson sur laquelle ne figure aucun membre du NPG. « Insatiable » a été enregistrée après le Nude Tour, aux studios Larrabee d’Hollywood pendant qu’il travaillait sur le maxi-single de « New Power Generation ». Deux versions inédites d’ « Insatiable » sont connues sur les bootlegs ou Internet : une version longue, qui est du même tonneau que celle de l’album, sauf qu’elle contient le couplet supplémentaire présent dans le livret de l’album mais coupé sur le disque.

Une seconde version circule depuis quelques années avec une instrumentation différente et jugée comme supérieure par beaucoup de fans. Le dernier couplet, très sensuel, sans équivoque et chanté/parlé dans une tonalité différente, aurait sûrement fait des ravages auprès de la gente féminine en concert. Le piano sur les dernières minutes rappelle « International Lover ». Bref, cette version imparable est enfin disponible officiellement avec un son parfait (et à la bonne vitesse). « Insatiable (Early Mix – Full Version) » a été mise en ligne sur le compte YouTube officiel géré par l’Estate le 24 août 2023, le jour de l’annonce de la sortie de ce coffret.

Glam Slam ’91 (6’16) – ‘hybride’ – version initiale de « Gett Off » envoyée à une radio de Minneapolis

  • 29 octobre 1990 – Paisley Park

Quelques jours après l’ouverture du club « Glam Slam » à Minneapolis et de l’avant-veille de la première du film « Graffiti Bridge » qui met ce club à l’honneur, Prince enregistre un titre appelé « Glam Slam ‘91 ». Cette chanson est un entre-deux, et peut être considérée soit comme un remix de « Love Machine » ou un prototype de « Gett Off » puisqu’une partie des paroles sera recyclée pour ce morceau quelques mois plus tard. Comme sur « Daddy Pop », Prince s’amuse avec les samples en reprenant le refrain de la face B « Escape » (du single « Glam Slam » sorti en 1988) et « Twelve » de Madhouse.

Pour faire la publicité du club et du concert qu’il devait y donner le soir-même, Prince envoie une version raccourcie de cette chanson à une radio locale (WLOL) le 6 janvier 1991.

Diamonds And Pearls (Long Version) (5’32) – version inédite

  • 19 novembre 1990 – Paisley Park (première session)
  • 16 décembre 1990 – Paisley Park (mix de version longue)

 « Diamonds And Pearls » a été enregistrée le 19 novembre 1990 avec Michael B., Sonny T., et Tommy Barbarella. Tommy faisait là son premier enregistrement avec Prince. Sonny et Tommy étaient à Paisley Park pour une session de répétitions avec le groupe Flash, construit autour de Margie Cox, avec les membres du Dr Mambo’s Combo dont Michael Bland. A la fin de cette session, Prince les a interceptés à la sortie prétextant qu’il avait besoin d’aide pour finir une chanson. Des ajouts (voix de Rosie Gaines, guitare de Levi Seacer Jr…) seront faits dans la foulée. La version longue proposée dans ce coffret, jusqu’alors inconnue, est un mix réalisé à la mi-décembre une fois toutes les prises faites. Elle servira de base pour la version album que nous connaissons tous.

NPG in full effect

Si la chanson « Diamonds And Pearls » peut polariser la communauté des fans princiers, certains la trouvant sirupeuse ou trop ‘commerciale’ (avec le sens que chacun veut mettre derrière ce mot valise), elle marque un tournant dans la carrière de Prince puisque c’est le premier morceau réellement enregistré avec les musiciens qui formeront son nouveau groupe : The New Power Generation (NPG). Bien que le nom fût connu depuis plusieurs années, le NPG a été construit progressivement avec un premier noyau dur formé pour le Nude Tour de 1990 : Michael B. à la batterie, Rosie Gaines aux claviers, les Game Boyz à la danse, percussion et rap. Levi Seacer Jr tient alors la position de bassiste, les parties de guitare étant assurée par Miko Weaver. Les relations entre Miko et Prince se dégradaient lentement, l’épisode capturé en vidéo de leur engueulade pendant les répétitions de la tournée n’étant qu’un évènement parmi d’autres. Chacun ayant un tempérament bien trempé, Prince a commencé à sécuriser ses arrières pendant la tournée en se rapprochant de son camarade de jeunesse, Sonny Thompson.

Sonny T.

Prince et Sonny se connaissent depuis les années 1970, chacun jouant dans un groupe de lycéens, Grand Central et The Family respectivement. Sonny a été une énorme influence pour cette génération de jeunes musiciens de Minneapolis et des environs. Prince lui-même citera Sonny T. comme ayant été son « idole de jeunesse », son « héros musical » et son « guitariste préféré ». En plus de lui avoir appris énormément de techniques et développé ses talents de guitariste, Sonny recrute Prince dans son groupe pour donner quelques spectacles et pour participer à des sessions d’enregistrements en studio en tant que musicien (les chansons « Stone Lover » et « Got To Be Something There »). Ce coup de pouce permet à Prince de se faire un peu d’argent pour préparer son fameux voyage à New-York en 1976 durant lequel il démarchera les maisons de disques à la recherche d’un contrat.

A noter : dans ce groupe nommé The Family mené par Sonny T. (sans rapport direct avec le groupe que construira Prince dans les années 1980 avec le même nom) figure un jeune percussionniste qui n’avait même pas 10 ans : Kirk Johnson. Près de 15 ans avant The New Power Generation, Prince, Sonny T. et Kirk Johnson jouaient donc dans la même formation, même si cela a été pour une période très courte.

Prince choisit de ne pas recruter Sonny T. dans son premier groupe professionnel, ni en tant que bassiste (la place est donnée à son meilleur ami de l’époque, André Cymone), ni en tant que guitariste (poste offert à Dez Dickerson après audition). Au départ de Cymone après le Dirty Mind Tour, Sonny croit comprendre qu’il va pouvoir prendre sa place, mais il apprend que Prince a changé d’avis et a préféré prendre Brownmark, plus jeune et plus malléable (Sonny est un peu plus âgé, mûr, nerveux et expert en arts martiaux). Après avoir fait un tour dans le groupe de Jesse Johnson pendant la période « Shockadelica », Sonny continue de mener sa carrière de musicien local en intégrant plusieurs groupes locaux dont The Steeles (dans lequel joue un certain Tommy Elm) et Dr. Mambo’s Combo dans lequel officient Michael B. et Margaret Cox. Sonny est invité à Paisley Park en 1989 pour jouer sur un titre, sans que cela n’aille plus loin pour le moment. « Love ‘s No Fun » d’Elisa Fiorillo, sorti sur son album « I Am » est la première chanson sur laquelle se retrouve le trio magique Prince / Michael B. / Sonny T.

Le Combo, qui joue dans le bar Bunkers Music Bar & Grill de Minneapolis, est recruté par Prince pour accompagner Mavis Staples lorsqu’elle fait la première partie sur certaines dates du Nude Tour. C’est sur ces dates que Prince approche Sonny pour lui donner des cassettes… Les rapports avec Miko n’allant pas en s’améliorant au fur et à mesure que la tournée avançait, les risques de départ précipité du guitariste étaient de plus en plus importants. Prince donne donc à Sonny des cassettes avec des morceaux à apprendre et lui demande de s’imprégner des concerts au cas où il devrait remplacer Miko au pied levé. La tournée se termine quand même sans encombre et Sonny retourne à ses occupations locales….jusqu’à ce qu’il soit appelé en urgence à la fin du mois de septembre 1990. Tevin Campbell doit faire une performance à l’Arsenio Hall Show, pour chanter « Round And Round », extrait de « Graffiti Bridge ». Les répétitions ont eu lieu avec le groupe de Prince qui l’a accompagné sur le Nude Tour, Game Boyz, Matt Fink et Miko inclus, mais Miko aurait été très exigent sur le cachet pour cette performance en réclamant un bonus à Prince. Refus du patron, qui finit donc par virer Miko, et réorganise le groupe en mettant Levi à la guitare et Sonny à la basse. Lorsqu’on a demandé à Prince pourquoi il a mis autant de temps à recruter Sonny dans son groupe, il a répondu : « Il faut beaucoup de courage, de maturité et d’humilité pour embaucher son mentor dans son groupe ».

Quelques semaines plus tard, Prince doit préparer les concerts qu’il doit donner en Amérique du Sud dont deux dans le cadre du festival Rock In Rio II. Tous les musiciens sont présents, sauf Matt « Dr » Fink, qui, pris par d’autres obligations, ne peut participer aux répétitions. Il est remplacé au pied levé par Tommy Elm, rebaptisé Tommy Barbarella (en référence au film de Roger Vadim), que Prince avait repéré dans des concerts locaux avec les Steeles.

Après cette session, les trois musiciens retournent à leurs occupations locales (Michael pour jouer avec le Doctor Mambo’s Combo, Sonny et Tommy pour jouer dans un autre bar avec les Steeles). Satisfait du travail, Prince envoie son garde du corps Duane (considéré comme son frère) chercher les musiciens en ville pour enregistrer un autre morceau à Paisley Park.

Live 4 Love (Early Version) (7’32) – version inédite

  • Nuit du 19 au 20 novembre 1990 – Paisley Park (première session)
  • 5 décembre 1990 – Paisley Park (enregistrements complémentaires ou mix)

Sonny, Tommy et Michael B. sont de nouveau convoqués à Paisley Park dans la nuit du 19 au 20 novembre pour enregistrer une chanson qui deviendra elle aussi un moment phare du prochain album : « Live 4 Love ». On a longtemps cru, sur la base des souvenirs de Michael B. que cette chanson et « Diamonds And Pearls » avaient été enregistrées en 1989, mais le travail sur les archives permet de corriger cela et de rétablir la bonne date.

Quelques jours après l’invasion du Koweït par l’Irak, Prince fait répéter « live for love » par le public hollandais lors du concert du 5 août 1990 à Heerenveen (dont nous parlions plus haut avec « The Flow »). L’escalade du conflit et la guerre imminente l’amène à enregistrer cette chanson dans laquelle il se met dans la peau d’un pilote de chasse qui questionne le sens de ses actions. Plusieurs prises vocales seront faites, les premières en falsetto. Sur cette « Early version » qui était inconnue des bootlegers, Tony M. est absent, mais Prince insère les couplets de « The Flow » (première version) bien que les paroles ne collent pas à la thématique de « Live 4 Love ». Visiblement, l’idée était que Tony enregistre ses couplets ultérieurement. Le public néerlandais chantant « live 4 love » et un sample de « Thieves In The Temple » sont audibles sur cette version. Prince retravaillera la chanson pour lui donner une tonalité plus rageuse en remplaçant le falsetto plutôt soft de la version initiale par un chant plus énervé. C’est cette version plus pêchue qui sortira en 1991.

« Diamonds And Pearls » et « Live 4 Love », enregistrés coup sur coup constituent donc les premiers morceaux sur lesquels les musiciens qui allaient bientôt se retrouver sous la bannière « The New Power Generation ». Ce qui devait être un remplacement provisoire de Matt Fink est devenu permanent ; après 12 années de bons et loyaux services, le docteur ne sera plus rappelé par Prince. Cette première incarnation de The New Power Generation tranche avec la mixité voulue et affichée des groupes princiers jusqu’alors. Rosie est la seule femme, Tommy Barbarella est le seul blanc. Hormis Rosie et Levi, tous les musiciens sont originaires de Minneapolis.

Diamonds & Pearlz

Suite à ces enregistrements, l’album prend forme avec l’élaboration d’une première configuration :

  1. Something Funky
  2. Daddy Pop
  3. Walk Don’t Walk
  4. Diamonds And Pearls
  5. Schoolyard
  6. Strollin’
  7. Willing And Able
  8. Insatiable
  9. Money Don’t Matter 2 Night
  10. Horny Pony
  11. Live 4 Love

Une seconde est élaborée à peine quelques jours plus tard avec un ordre des titres légèrement différent, mais surtout l’ajout de « Call The Law » et « The Flow » pour affirmer l’orientation rap choisie par Prince.

  1. Daddy Pop
  2. Walk Don’t Walk
  3. Schoolyard
  4. Strollin’
  5. Willing And Able
  6. Diamonds And Pearls
  7. Insatiable
  8. Money Don’t Matter 2 Night
  9. Horny Pony
  10. Live 4 Love
  11. Something Funky (This House Comes)
  12. Call The Law
  13. The Flow

Les travaux ne s’arrêtent pas pour autant puisque Prince et son groupe vont retravailler certains de ces morceaux et en créer d’autres.

Cream (Take 2) (4’50) – version inédite

  • 3 décembre 1990 – Paisley Park

Plusieurs versions alternatives de « Cream » circulent sur le net, principalement des remixes. La version proposée sur ce Super Deluxe a été enregistrée en studio avec les musiciens et nous était inconnue. « Cream (Take 2) » n’avait pas été mixée à l’époque (Chris James l’a fait pour ce Super Deluxe) et on peut y entendre Prince donner des instructions, ce qui indique que cette répétition n’était pas destinée à sortir du coffre.

Le 6 janvier 1991, « Glam Slam ‘91 » est diffusé par la radio de Minneapolis WLOL pour promouvoir le club du même nom et le concert qui y aura lieu le soir même. Ce concert surprise sert de répétition générale pour les festivals rock de Rio et de Buenos Aires prévus un peu plus tard dans ce mois. Au cours de ses concerts, Prince dévoile non seulement son nouveau groupe, mais aussi des inédits prévus pour son futur album : « Horny Pony », « Money Don’t Matter 2 Night », « Jughead », « Call The Law » et « Something Funky (This House Comes) ». Après ces festivals, Prince revient à Paisley Park pour retravailler des morceaux et en créer d’autres.

Horny Pony (Version 2) (4’21) – version inédite

  • 6 septembre 1990 – Tokyo, Warner Pioneer Studios (Version 1)
  • 29 janvier 1991 – Paisley Park (Version 2)
  • 31 janvier 1991 – Paisley Park (Band Version – Version finale)

 La ‘Version 2’ de « Horny Pony » présente dans ce coffret est un réenregistrement datant du 29 janvier 1991. La première prise a été faite à Tokyo, en septembre 1990 pendant les dernières dates du Nude Tour (en même temps que « Call The Law » et «Something Funky (This House Comes »)). Cette version de 1990 reste inédite. Ce réenregistrement de fin janvier 1991 est loin de la version finale. On y retrouve Prince seul sur une rythmique, sans aucun synthé, faisant toutes les voix, y compris celles qui devront être chantées par Rosie Gaines, Robin Power et les Game Boyz. La version finale sera enregistrée avec le groupe deux jours plus tard, en même temps que « Jughead », « Hold Me », et « Blood On The Sheets ». « Jughead », qui a la particularité d’avoir longtemps figuré dans la liste des 10 moins bonnes chanson de Prince, est une adaptation d’un morceau des Game Boyz nommé « Money Matters ». « Horny Pony » et « Jughead » sont dans la tradition des morceaux qui présentent de « nouvelles danses » comme « The Walk », « The Bird » et « Housequake ».

Différentes versions de « Horny Pony » ont été placées sur les configurations de l’album « Diamonds And Pearls » (et circulent sur des bootlegs et Internet). Le succès en club de la version de 10 minutes de « Gett Off » a changé la donne, et « Horny Pony » a été évincée de la tracklist à la dernière minute. « Horny Pony » a été retirée de l’album, quitte à créer quelques incohérences, cette chanson s’ouvrant par la phrase « new dance commercial take 1 » et « Jughead » par « new dance commercial take 2 ». « Horny Pony » est également citée dans le rap de « Push » qui mentionne tous les premiers titres de l’album. Pour limiter les dégâts, le titre est conservé dans le tracklist sur la pochette du disque, mais même avec toutes ses qualités, personne ne s’est plaint du remplacement de « Horny Pony » par « Gett Off » et de son passage de morceau d’album à face B.

Pour ceux qui apprécient ces petits moments où Prince fait référence à un morceau d’un autre artiste, réécoutez attentivement la version officielle de « Horny Pony » puis « In Time » de Sly And The Family Stone.

Something Funky (This House Comes) (Band Version) (7’04) – inédit

  • 6 septembre 1990 – Tokyo, Warner Pioneer Studios (Version 1)
  • novembre 1990 – Paisley Park (enregistrements complémentaires)
  • 31 janvier 1991 – Paisley Park (Band Version – mix final)

« Something Funky (This House Comes) » est connue pour avoir été jouée lors du concert donné à Rio en janvier 1991, diffusé à la radio et sur quelques chaines de télévision. C’est un morceau de Tony M. dans lequel chaque membre du groupe est présenté. La première version enregistrée à Tokyo, probablement revue plus tard dans le courant de l’année 1990, présente une configuration différente du NPG avec Levi à la basse, Tommy aux synthés, Michael B à la batterie, Kirk Johnson aux percussions et Rosie Gaines au chant. Prince est totalement absent de cette version. « Something Funky (This House Comes) » sera revue en novembre 1990  pour être interprétée lors des concerts en Amérique du Sud. De retour à Paisley Park, une version enregistrée en novembre  ( avec tous les membres du NPG sauf Rosie Gaines qui manque à l’appel, remplacée temporairement par Prince au refrain) est mixée. C’est cette version qui est incluse dans le Super Deluxe. Comme pour « Daddy Pop », des indices sont laissés pour nous faire comprendre que cette version était prévue pour un maxi-single. « Something Funky (This House Comes) » était placée sur différente configuration de l’album « Diamonds And Pearls » avant d’être définitivement remisée dans le Vault.

Hold Me (4’36) – version inédite du titre sorti par Jevetta Steele

  • 31 janvier 1991 – Paisley Park

« Hold Me » a été offerte à Jevetta Steele avec « Open Book » pour la réédition de son album « Here It Is » (la version internationale de 1993). Ce slow était initialement prévue pour l’album « Diamonds And Pearls » mais en a été écarté à cause de ses similitudes avec le morceau-titre. Aucune différence notable sur cette version avec celle que l’on connait depuis plusieurs années, hormis la qualité sonore.

 

The Last Dance (Bang Pow Zoom And The Whole Nine) (5’36) – inédit

  • 31 janvier 1991 – Paisley Park (Jughead)
  • 12 février 1991 – Paisley Park

Comme dit plus haut, « Jughead » a été créée le même jour où le groupe était réuni pour enregistrer/réenregistrer  « Hold Me », la version finale de « Horny Pony » et « Blood On The Sheets ». Quelques jours plus tard, Prince convoque Tony M. pour retravailler « Jughead » et en créer une version ‘délire’ appelée « The Last Dance (Bang Pow Zoom And The Whole Nine) ». L’intention derrière ça n’est pas claire, mais Prince a l’air de bien s’éclater et déconne comme il l’a rarement fait sur ses chansons. En dehors de cela, l’intérêt est limité.

Avec « Thunder » (enregistrée le 26 janvier) et « Push » (enregistrée le 5 février), Prince a de quoi revoir le contenu de son prochain album et sélectionner 13 titres pour son treizième album:

  1. Thunder
  2. Daddy Pop
  3. Diamonds And Pearls
  4. Cream
  5. Strollin’
  6. Willing And Able
  7. Horny Pony
  8. Walk Don’t Walk
  9. Jughead
  10. Money Don’t Matter 2 Night
  11. Push
  12. Insatiable
  13. Live 4 Love

La retouche ultime se fera au début de l’été avec le remplacement de « Horny Pony » par « Gett Off ». Comme souvent, le dernier titre enregistré devient le premier single.

 

« Gett Off » ne devait être qu’une chanson destinée aux DJ, pressée en 1500 exemplaires. Bien que le titre dure presque 10 minutes, « Gett Off » rencontre un gros succès en club. Pour capitaliser dessus, Prince réalise un remix, pour l’inclure dans l’album à venir. La version originale est incluse dans les disques « Mixes & Edits Remastered » de ce coffret.

Prince étant Prince, il choisit de placer en ouverture de cet album sorti sous le nom de Prince & The New Power Generation une chanson qu’il a enregistrée seul : « Thunder ».

Thunder Ballet (10’56) – ‘hybride’ – version incluse dans la VHS du Joffrey Ballet puis diffusée sur le NPGMC.

  • 26 janvier 1991 – Paisley Park (Version initiale)
  • 22 avril 1991 – Paisley Park (Ajout de synthés)
  • 3 octobre 1991 – Paisley Park (version Ballet)

Pour clore la série des « Vault Tracks », l’Estate a sélectionné un titre qui n’est pas un inédit, en l’occurrence le « Thunder Ballet ». Cette version longue « Thunder » (elle aussi de 10 minutes) a été créée par Prince pour la troupe de danse Joffrey Ballet qui a construit un spectacle autour de sa musique. Ce spectacle, nommé Billboards, est sorti en VHS dans les années 90. Prince a ensuite diffusé cette version dans le NPG Music Club. Sa présence sur la série des Vault Tracks est donc plutôt déplacée, mais bon. Cette version reste plaisante et préfigure ce qu’il fera quelques années plus tard avec « Kamasutra ».

Gold & Platinum

La stratégie mise en place par Prince, la Warner et Frank Dileo fonctionnera parfaitement. Les performances télévisées bien choisies (MTV Awards et Arsenio Hall Show), les clips bien réalisés, des interviews pour la presse, des singles bien choisis et ciblés ont contribué au succès de l’album « Diamonds And Pearls » à l’échelle mondiale. Avec plus de 6 millions d’exemplaires vendus, cet album sera le deuxième plus gros succès commercial de Prince, après « Purple Rain » et devant « Batman ».

Le choix des singles est un sujet épineux qui a parfois amené des échanges tendus entre Prince et son label, mais l’artiste a toujours eu le dernier mot avec les chances de succès ou les risques d’échec qui allaient avec. La promotion de « Sign O’ The Times » avait pris du plomb dans l’aile avec la sortie d’ « If I Was Your Girlfriend », tout comme « Lovesexy » avec « Glam Slam ». Pour « Diamonds And Pearls », Prince n’a pris aucun risque et sélectionné des titres qui pouvaient passer sans problème à la radio ou à la télévision pour un public de 7 à 77 ans (« Cream », « Diamonds And Pearls » et « Money Don’t Matter 2 Night »), cibler spécifiquement le public noir  avec des sonorités en vogue (« Gett Off ») ou R&B traditionnel (« Insatiable »). Deux de ces singles seront accompagnés de maxis avec de nombreuses variations ; plusieurs mixes et remixes de « Gett Off » existent, mais ne sont pas tous dignes d’intérêt. Contrairement aux autres rééditions Deluxe, l’Estate a choisi de ne pas réunir de façon exhaustive toutes ces versions mais de n’en sélectionner que quelques-uns (tant mieux). Nous retrouvons donc dans le disque « Mixes & Edits Remastered » deux mixes différents de « Gett Off » (la version originale de 10 minutes et le remix « Houstyle ») et deux variations (« Violet The Organ Grinder » et « Gangster Glam », un rap de Tony M. où l’influence du morceau « Boomin’ System » de LL Cool J est encore plus évidente. Pour « Cream », les remixes de « Do Your Dance » ont été écartés. Seul trois pistes du maxi-single original ont été gardées pour ce coffret : Cream (N.P.G. Mix), Things Have Gotta Change (Tony M. Rap) et Do Your Dance (KC’s Remix). L’écoute attentive du remix de « Cream » réalisé en septembre 1991 révèle l’utilisation de samples provenant de « High Fashion » et « Love Or money » mais également d’échantillons que nous retrouverons dans « My Name Is Prince », enregistré le même mois. L’album « Diamonds And Pearls » n’était pas encore sorti que Prince avait déjà commencé à travailler sur l’album suivant ! On comprend que l’Estate ait souhaité éviter la surcharge et les redondances, mais on peut regretter l’absence de « Clockin’ The Jizz » et « Get Some Solo » qui valent le détour. « Horny Pony » et « Call The Law » qui ont été écartés de l’album à différents moments sont bien présents sur cette série de titres. A l’exception de la version live de « Willing And Able » (tirée du clip) et la version edit d’ « Insatiable » qui contient quelques notes de synthés en plus sur l’intro, les autres versions singles n’ont pas d’intérêt particulier.

« Cream » sera la dernière chanson de Prince à atteindre la première place du Billboard Hot 100. Les passages radio et TV incessants (heavy rotation) ont permis à Prince de régénérer considérablement sa base de fans. Si des réserves ont été émises sur le virage rap par ses fans les plus anciens, la tournée qui a suivi a fait l’unanimité au Japon et en Europe avec un passage triomphal en Australie où Prince mettait les pieds pour la première fois (comme le Nude Tour, la tournée ne passera pas par les Etats-Unis).

 

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