Je me réveille, et même si j’ai mal aux jambes, je retrouve cette étrange excitation que j’avais dans mes jeunes années. Je n’ai rien envie de faire. Je suis à Las Vegas et je n’ai rien envie de faire d’autres que d’être dans l’ambiance « Princière ». Attendre devant la porte du club et si stupide et pourtant il se passe tellement de choses insignifiantes pour le commun des mortels et tellement « passionnantes » pour nous ☺ : les musiciens entrent et sortent, on entend un peu du soundcheck, on parle avec les fans, le staff distille les anecdotes… On a l’impression de vivre la même histoire qu’eux.
Bref couché à 5 heures du matin, réveillé à 10 j’essaye de me raisonner. JMS dort encore… Que c’est long d’attendre.
A 13 h on quitte notre hôtel.
15 H nous voilà au Rio, ça y est je respire ☺
Cody (voir les épisodes précédents) est là, il a dormi assis dans l’hôtel puisque venant de L.A la veille il n’avait pas prévu (et pas les moyens) de rester dormir. J’en profite pour ajouter une petite anecdote a propos du vendredi soir. Dans le restaurant au moment ou Sam partait dans sa chambre, il s’est donc arrêté à notre table. Cody explique qu’il ne sait pas ou si il va rester, Sam le tente en disant qu’il doit le faire, ce à quoi il répond qu’il n’a même pas d’endroit ou se doucher. Sam lui donne alors le numéro de sa chambre et l’invite a venir utiliser sa douche le lendemain matin. Quand je vous disais que les proches de Prince étaient devenus étrangement très attentifs, voire attentionnés avec les fans, je n’exagérais pas.
Rita et Lori ne sont pas encore là, Matt est dans le coin.
Nous allons manger un bout et autour de 16 h on vient prendre nos places.
D’un coup je reprends mes esprits et je me dis « mais allons vers la porte quand même » ☺
Et pour cause le soundcheck a déjà commencé. Lorsque j’arrive Prince s’éclate sur « Hair » de Graham Central Station. Cela dure un bon moment.
Puis il enchaîne sur une chanson que je ne connais pas.
Dire que c’est un inédit me paraît hâtif, mais franchement d’où cela peut-il provenir ? Aucune des personnes présentes n’est capable de nommer cette chanson.
Ensuite nous sommes en terrain connu, mais quel pied. Prince et son groupe en train de partir dans un délire funk : Uptown / Sexy Dancer / Le Freak / I like funky Music / Last night my DJ saves my life…
Un sacré Jam où tout le monde semble s’amuser, et qui peut-être sera pour ce soir.
La file se remplit comme la veille, petit à petit par les fans, puis par des gens venus pour l’évènement ou parce qu’ils étaient en ville. Même si le concert est complet, le guichet ne désemplit pas de personnes qui veulent voir Prince sur scène.
Ouverture des portes, pas de fouille, même place que le vendredi, soit à 1,5 mètres du micro.
DJ Rashida prend les commandes à 22 h, son set n’est pas totalement calqué sur celui de la veille comme j’ai pu le lire.
00h10 extinction des lumières, pas de films ce soir.
Une longue intro (ambiance sonore dans les basses) avec le rideau fermé fait monter la pression.
« Las Vegas are you ready ! », le rideau se lève : Prince armé de sa guitare débute
– Sexuality
Comme vous le savez ce titre est renommé Spirituality. Personnellement je m’en tape pour une bonne raison je n’ai jamais vu Prince jouer ce titre en live de mes yeux. Donc s’il veut changer un mot et que ça l’amuse ce n’est pas mon problème. Je préfère qu’il change les mots plutôt qu’il s’interdise définitivement des titres de son répertoire. De plus je trouve assez amusant de voir qu’en ne modifiant qu’un mot le reste du texte garde sa cohérence.
Sommes nous partis pour un show plus rock que vendredi ?
La question se pose puisqu’il enchaîne avec
– Johnny B Good
Franchement quand j’ai vu qu’il chantait ça j’ai un peu eu peur. D’abord je me suis dit qu’il faisait ce genre de cover pour Vegas, et qu’ensuite ça risquait d’être moyen. Et bien j’ai été assez agréablement surpris. D’abord parce que sa version est assez courte, ensuite parce que ça lui permet de jouer avec le public, et enfin parce qu’il maltraite encore un peu sa guitare et que cela est un enchantement
Otis prépare les paroles de je ne sais plus quel titre, qui est normalement prévu. Si je ne m’en souviens pas c’est parce que Prince crée alors un effet de surprise monstrueux en criant dans son micro :
– Girls and boys
Le groupe suit, les twins sont là, Otis barbotte dans sa boîte pour trouver le texte, et heureusement. Si je n’ai jamais vu Prince vraiment utiliser ses antisèches, sur Girls and Boys il n’a pratiquement pas quitté son pupitre des yeux. Comme quoi ce titre venait d’être ajouté à la set liste depuis très peu de temps (voire même aujourd’hui). C’est aussi l’occasion pour lui de prendre sa basse noire, et donc d’interpréter cette chanson à 2 basses.. Faut il insister sur le groove que ça a donné ?
La version est complète, et la salle suit comme un seul homme, reprenant le petit mouvement des bras bien connu de vous tous.
Premier moment de calme et arrivée de Renato sur un blues
– The sun is gonna shine again
Même si ce titre n’a pas été joué jusque-là à Las Vegas, Otis en possède les paroles. J’insiste depuis deux reports sur les paroles car il semble que ce soit relativement important pour Prince ces derniers temps. Il exige, selon son humeur et ce qu’il veut jouer ou reprendre, que les paroles soient imprimées dans la journée même. Conclusion Otis a chaque jour de plus en plus de textes à gérer, certains plastifiés (glissants et donc infernaux à classer), d’autres non.
Cela permet à Prince un plus grand confort sur ses impros, car à n’importe quel moment il peut exiger un titre et être a l’aise avec ses lyrics.
The sun is gonna shine again est une reprise de Ray Charles. Je ne le savais pas pour être honnête. Ce qui est drôle c’est qu’après le concert, je voulais en savoir plus sur cette chanson. Je vais voir Josh (le bassiste) et lui demande d’où ça vient, il me répond « je n’en sais rien,c’est la première fois que je l’entends ». Je vois Maceo quelques instants plus tard, et je me dis que cette encyclopédie vivante devrait avoir la réponse. Je lui pose la question et il me répond « je ne sais pas. Il m’a demandé de jouer le blues, alors je joue le blues… Mais d’après Prince c’est Ray Charles, pourtant je maîtrise Ray Charles mais je ne connais pas ce morceau ».
Après vérification c’est bien Ray Charles. Ce qui confirme la culture immense de Prince, je veux dire musicalement du moins.
Après ce début de concert bien surprenant, il est normal de reprendre le chemin du noyau dur de ces concerts à Vegas ;
– Lolita
– Black Sweat
– Kiss
– Shhh
– Musicology
– Passe the peas / Shake everything you’ve got
– Joy in repetition
Puis départ immédiat de
– Anotherloverholenyohead
Mais les twins ne sont pas sur scène. Est ce normal, n’ont elles pas eu le temps de se changer ? Toujours est il que Prince fait le premier couplet en instrumental, les filles arrivent pour le refrain et tout se passe bien sur la suite.
– If I was your girlfriend
Pendant l’intro pas d’arrêt de sa part ce soir, au contraire, face aux hurlements du public il dit avant de commencer à chanter : « you got it tonight »
– Pink cashmere
Très belle prestation encore, Prince retrouve ses réflexes de « lover boy ». Il parle à son micro devenu une femme l’espace d’une chanson, et ce soir, il la (le ? ) désir tellement qu’il lui chante même un peu de Do Me Baby.
Départ de sa majesté pour un premier rappel.
Le voici de retour, il se dirige vers son « guitar tech » et lui demande sa basse.
« Where are we ? » demande t il. Notre réponse arrive en même temps que le beat de
– 3121
Le rythme tourne longtemps, Prince joue gravement de la basse, il quitte la scène, part vers les « VIP », se retrouve au fond de la salle puis il revient tenant par la main … Rhonda Smith
La jolie Rhonda armée de la basse Princière nous offre un très joli solo, depuis le temps qu’on attendait de voir Rhonda Smith s’exprimer seule, il faut avouer que c’est agréable.
Prince est un peu plus fidèle au titre original dans cette interprétation. Ca jam, ça joue, c’est funk, et à la fin il quitte de nouveau la scène pour aller nous préparer (mais le sait-il déjà), un coup de grâce Funky.
Comme hier Prince commence le riff de
– Play that funky music
Cody qui était monté sur scène le vendredi pour interpréter cette reprise, tente de nouveau d’attirer l’attention de Prince mais ce soir il semble décider à la chanter lui même. Une fois de plus ça groove vraiment, et Prince enchaîne les breaks.
D’un coup, allez savoir pourquoi, alors qu’il joue un peu avec sa guitare, il balance le Riff de
– Start me Up
des Rolling Stones. On pousse alors des hurlements d’encouragements. Non pas que nous soyons particulièrement fans du titre, mais le côté inattendu et « inédit » de la chose suffit souvent à rendre dingue les fans. Prince se laisse porter et invite le groupe à le rejoindre sur le morceau.
Cody, au premier rang à notre gauche, chante fort le refrain, Prince le remarque, et lui donne son micro. Oui, vous avez bien lu. Il ne le fait pas monter sur scène. Il lui donne son micro que le jeune fan prend pour chanter… Au même instant Morris Hayes quitte ses claviers pour se lancer dans une imitation de Mick Jagger. Prince se retourne et éclate de rire. Voir ce grand mec de presque 2 mètres, les yeux exorbités, mimer le leader des Stones est en effet très drôle, c’est la folie totale sur scène et dans la salle. Otis est en panique au niveau des paroles, preuve que Prince est encore partie dans un délire imprévu.
Confirmé par :
– What have you done for me lately
De Janet Jackson. Les twins chantent aussi, ca jam, Prince hurle « Minneapolis style » (ou sound peut être ☺)
Devant, on est vraiment dingue, tout le monde danse, chante… Et là je repense au jam de l’après-midi, il faut que Prince aille dans cette direction. Jms et moi lançons alors des
– I like funky music
très vite repris par Cody et quelques autres. Prince entend ça, se retourne vers nous, nous encourage, et chante à son tour ce morceau.
Puis il regarde son groupe pour lui faire signe de le suivre tandis qu’il commence
– Sexy dancer
Nous qui pensions être au sommet de notre plaisir, ce salopard du Minnesota nous fait encore monter d’un cran. Prince semble avoir envie de communiquer, donc communiquons. Il a sa basse entre les mains (peut être depuis what have you done for me lately d’ailleurs, ma mémoire me fait défaut), Otis a sorti « It’s alright » de Graham Central Station depuis un moment, mais nous avons encore envie de voir Prince « nous suivre ».
Nous tentons alors
– 777-9311
là encore repris par le premier rang, Prince nous regarde en disant « mais je n’ai pas prévu celle là », puis « on the one » : le groupe s’arrête net et Prince balance la fameuse ligne de basse du hit de The Time. Nous sommes hystériques, Prince qui joue ce qu’on demande c’est une sorte de paradis… Je resterai bref sur ce sentiment de complicité que l’on peut avoir quelques secondes avec l’artiste, car non seulement c’est très personnel, mais en plus ce n’est pas vraiment explicable car absolument pas concret. Mais autant vous dire que les minutes que nous vivons à ce moment me replongent un peu plus dans ma dépendance à cet homme, sa musique, et ses concerts.
Prince torture littéralement sa basse, le groove continue, sur quoi va-t-il enchaîner ? Brick house ? Hair ? Skin Tight ? qui sont des titres qu’il nous a habitué à entendre quand il a envie de slapper… Non bien sûr, quitte à nous faire halluciner autant aller au bout des choses :
– Give it to me baby
de Rick James. Prince qui joue RICK JAMES. Il aura fallu que celui-ci décède pour que l’ancestrale querelle cesse et que Prince le range avec les incontournables funkateers. Et attention, il ne fait pas que jouer la basse, les « paroles » sont dispos au rayon Otis ☺ et il chante vraiment ce standard. Petit retour par « I like funky music » poursuivi par le public après le break du groupe.
– It’s alright
Finalement Otis n’aura pas sorti les paroles pour rien il y a plus d’un quart d’heure. L’explosion funk prend fin sur cette petite bombe « made in GCS». Prince quitte la scène, dernier rappel.
Le final semble parti pour ressembler à celui d’hier :
– Wonderful world
Par Maceo et Renato
– A case of U
Une fois de plus Prince donne toute son émotion et tout son talent de chanteur, seulement accompagné par Renato Neto
– Purple Rain
« I like this song » dit il… Il regarde le ciel pratiquement tout le long, il est totalement habité… Ce sera le seul moment où il parle de Jéhovah, la propagande n’est donc pas trop indigeste, un clin d’œil à son dieu à la fin d’un concert qui commence par Spirituality. La boucle est bouclée.
Ce soir, il chantera son plus grand hit en entier, et Let’s go crazy passera à la trappe.
Que dire d’autre que Merci. Ca semble bien stupide de remercier un type pour qui l’on vient de se ruiner, et pourtant le bonheur que nous venons de vivre mérite notre gratitude…
Dire que nous ne sommes pas au bout de nos surprises.
La salle se vide, je traîne car encore sous le choc. DJ Rashida officie pour les 4 ou 5 personnes qui sont encore à leur table. Je me dirige tranquillement vers le bar pour rejoindre la sortie quand une série de bodyguards débarque. Au centre : Prince himself qui va discuter avec miss DJ, et lui demande de passer je ne sais quelle chanson. Il reste un instant. On nous demande de partir. JMS est déjà dans le restaurant en compagnie de nos amis, je fais quelques photos et filme un peu pour illustrer ces reports, et je me dirige au 3121 Jazz cuisine sans avoir la moindre idée de ce qui nous y attend…